Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Zootographe - Blog non-officiel du Zooparc de Beauval
27 janvier 2023

Le Lamantin des Caraïbes ou de Floride

1 (2206)MANDILO et sa mère FEMORE (photo prise le 21/02/15).

Nom scientifique : Trichechus manatus

Synonymes : Boeuf marin, Femme marine (!), Lamantin d'Amérique, Lamantin des Antilles, Lamentin, Manati, Poisson-boeuf, Poisson-femme, Vache de mer, Vache marine.

Classe : Mammifères

Ordre : Siréniens

Famille : Trichéchidés

Description : très gros mammifère marin, au corps gris-brun en forme de barrique, à la nageoire caudale en forme de pelle et aux nageoires pectorales "en palette", massives et longues. Membres antérieurs développés en palettes et garnis d'ongles. Pas de membres postérieurs.

Crâne large, avec des petits yeux noirs de 15 mm de diamètre sur le côté ; museau dirigé vers le bas avec une lèvre supérieure large, épaisse et munie de vibrisses, et un menton pourvu de poils très longs et de replis ; narines très haut placées et munies de valves pour faciliter la respiration à la surface et la plongée en apnée. Cou quasiment invisible, à peine matérialisé par quelques plis.

Peau grise, sombre sur le dessus et plus claire sur le dessous, quasiment glabre, les poils étant plus apparents chez les très jeunes individus ; chez les adultes, elle est souvent couverte par des algues (quelques-uns des animaux visibles à Beauval en ont le corps recouvert !) ou des balanes. Les nouveaux-nés ont une couleur plus sombre.

Mâle et femelle se ressemblent, même si les secondes sont souvent plus grandes.

Longueur (corps) : 2,7 à 3,5 m, max. de 4,6 m.

Poids : 200 à 600 kg, exceptionnellement jusqu'à 1,655 kg. Les femelles sont souvent plus grandes que les mâles.

Durée de vie : 50 à 65 ans, max. de 69 ans (record détenu par Snooty, animal pensionnaire d'un aquarium de Floride, né en 1948 et mort en 2017).

Aire de répartition : Sud des Etats-Unis, Amérique centrale, Antilles et Nord de l'Amérique du Sud jusqu'à la Guyane et au Brésil. Quelques-uns se dispersent dans l'Atlantique Nord, jusqu'aux Bahamas et même à New York. 2 sous-espèces connues : la sous-espèce type T. m. manatus qui vit en mer des Caraïbes et la sous-espèce de Floride proprement dite T. m. latirostris.

Habitat : rivières, canaux, estuaires, mangroves, canaux et criques en zone tropicale et subtropicale. Il peut vivre en eau douce, saumâtre ou salée, claire ou boueuse.

Comportement : il se propulse dans l'eau à l'aide de sa palette caudale. Il est très agile dans l'eau, et il peut aussi "marcher" sur le fond en s'aidant de ses nageoires pectorales. Cependant, il reste souvent dans les eaux peu profondes, plongeant rarement à plus de 6 mètres. Il passe la journée à se nourrir et à se reposer, mais doit remonter à la surface toutes les 3 à 5 minutes pour respirer (toutes les 30 secondes en cas d'effort intense). Il ne nage pas à des grandes profondeurs (ne dépasse pas 10 mètres en général).

Il vit solitaire ou en petits groupes. Lors d'une rencontre avec un congénère, il a besoin de contacts physiques : ils se frottent l'un contre l'autre et il leur arrive de s'embrasser "à la russe". Ses vocalisations (cris, gazouillis et sifflements) sont diversifiés et jouent un rôle important dans la communication, mais il ne possède pas de cordes vocales.

Sa vitesse est de 5 km/h mais il peut atteindre 25 km/h en cas de dangerIl lui arrive de migrer si l'eau se refroidit (il ne peut survivre dans une eau de moins de 18°C).

Il vit solitaire ou en petits groupes lâches pendant la période de reproduction, en présence de de nourriture abondante ou d'une source d'eau chaude ; il y a aussi des groupes temporaires de jeunes mâles (non-reproducteurs).

1 (14568)Le 25/10/2018.

Il n'a pas de prédateur naturel même si l'Homme le chasse depuis longtemps (époque précolombienne) ; sa chasse est actuellement interdite dans un certain nombre de pays.

Alimentation : algues et plantes aquatiques (une soixantaine d'espèces différentes ; une des espèces d'herbe dont il se nourrit, Syringodium filiforme, porte même le surnom d'herbe du Lamantin !), feuilles, rhizomes, ainsi que les poissons, crustacés et mollusques qui s'y cachent. La valeur nutritive de son alimentation étant assez faible, il doit en manger 30 kg par jour et consacrer entre 6 et 8 heures de sa journée à s'alimenter.

1 (1572)Le (très jeune) MANDILO, le 02/06/2014.

1 (10568)... et la tout aussi jeune KALI'NA, le 12/11/2017.

Reproduction : il peut se reproduire toute l'année mais il semble être plus actif sexuellement à la saison des pluies (de mars à août).

Pendant la période de reproduction, la femelle peut se faire poursuivre par 20 mâles pendant une durée comprise entre 1 semaine et 1 mois ! Elle peut s'accoupler avec plusieurs mâles durant une courte période (polyandrie).

L'accouplement a lieu dans un lieu calme comme une anse ou une lagune, avec des reliefs permettant aux animaux de se frotter et de laisser des traces olfactives sur leur passage. Le mâle et la femelle se flairent aussi mutuellement.

Après une gestation de 11 à 14 mois, la femelle donne naissance à un petit unique (exceptionnellement des jumeaux comme ce fut le cas à Beauval en 2003 !) qui mesure entre 1 et 1,4 mètre et pèse 30 kg.

Le jeune mange de la nourriture solide dès l'âge de 3 semaines. Il reste avec sa mère pendant 2 ans et atteint sa maturité sexuelle entre 7 et 9 ans. La relation mère-enfant est la seule relation sociale stable connue chez cette espèce.

Les femelles se reproduisent tous les 3 à 5 ans, parfois plus souvent si un petit décède prématurément.

Statut IUCN : vulnérable

1 (11653)Kakémono relatif à un programme de réintroduction du Lamantin en Guadeloupe, envisagé dans les années 2010 mais abandonné depuis... Ce support était apposé un temps sur la Passerelle de la Conservation, la photo a été prise le 28/01/2018.

Menaces et protection : c'est une espèce en diminution (moins de 10.000 individus), mais les populations augmentent en Floride (env. 5000 individus) et, plus marginalement, dans les eaux de quelques autres territoires (Bahamas, Porto Rico...) où elles bénéficient de mesures de protection effectives. Inversement elle a disparu ou est devenue très rare aux Petites Antilles.

Elle subit la chasse, la destruction de son habitat, les collisions avec les engins nautiques (hord-bord, jet-ski...), l'ingestion d'articles toxiques et/ou étouffants (sacs et déchets plastiques, filets de pêche...) et de résidus de pesticides (bio-accumulation) et aussi des événements naturels comme les blooms (proliférations d'algues) planctoniques toxiques et les vagues de froid (qui peuvent se déclarer occasionnellement en Floride pendant l'hiver et causer stress, hypothermie et mort aux lamantins). De plus son rythme de reproduction est lent, ce qui rend difficile la reconstitution de ses effectifs.

Les premières mesures de protection de l'espèce ont été édictées en Floride (voir ci-dessous), ce qui a permis une reconstitution de ses effectifs dans cet Etat, passant de 1.267 têtes en 1991 (et seulement quelques centaines dans les années 1970...) à 5.067 en 2010.

L'Aquarium de Miami est le premier établissement à avoir reproduit les Lamantins en captivité, suivi depuis par divers zoos et aquariums à travers le monde, toutefois assez peu nombreux à ce jour.

9 parcs zoologiques en élèvent sur le continent nord-américain pour une population d'environ 40 têtes, le plus grand groupe, fort d'une quinzaine d'individus, vivant au Zoo de Tampa (Floride).

En Europe, 10 établissements en ont (source : Zootierliste, données de janv. 2023) dont 2 en France : Beauval et le Zoo de Vincennes (Paris). Ils totalisent une quarantaine d'animaux, appartenant à la sous-espèce type T. m. manatus et faisant l'objet d'un programme d'élevage conservatoire coordonné par le Zoo de Nuremberg (Allemagne).

En dehors de ces deux continents, le seul groupe d'envergure (une quinzaine d'animaux) vit au Zoo de Singapour.

Il est inscrit à l'annexe I de la Convention de Washington ou CITES, ce qui signifie que son commerce international est interdit.

La chasse et les captures intentionnelles étant devenues rares de nos jours, la protection de l'espèce passe surtout par la création de réserves où les activités nautiques sont interdites ou réglementées, la mise en place d'équipements réduisant les accidents (sur les bateaux de loisirs, les navires commerciaux, les écluses, etc...), l'éducation des professionnels du tourisme et des vacanciers, la réhabilitation des Lamantins accidentés (dans des centres de soins), l'écotourisme (en veillant à ne pas contribuer au dérangement des animaux).

Un projet de réintroduction de l'espèce (soutenu en son temps par l'association Beauval Nature) avait été en cours en Guadeloupe, d'où l'espèce avait disparu depuis 1 siècle, mais a été mis à l'arrêt en 2020.

1 (8317)Le petit CANOUAN (photo prise le 21/05/2017).

Au Zooparc de Beauval : l'espèce est présentée depuis 1997. Pendant de longues années, le groupe a vécu dans un grand bassin au fond de la serre aux Gorilles, partagé avec de nombreuses espèces de poissons et des tortues d'eau. Il était historiquement composé de 2 mâles (ORLANDO né le 03/02/1996 au Zoo de Nuremberg et MISSOURI né le 16/09/1995 au Zoo d'Arnhem) et 1 femelle (DAPHNEE née le 24/05/94 au Zoo d'Amsterdam). Une autre femelle, VERONICA, provenant du Zoo d'Arnhem, a également été présentée dans les premières années. Plus récemment une nouvelle femelle, FEMORE, née le 17/08/2017 au Zoo d'Odense (Danemark), est arrivée le 12/04/2011. Pendant très longtemps, ce groupe est resté unique en France jusqu'en 2014, année de l'arrivée de l'espèce au Zoo de Vincennes (Paris).

Depuis le 25/11/2019, les Lamantins ont été transférés dans le tout nouveau Dôme équatorial (ouvert au public en février 2020) où ils occupent le plus grand bassin, toujours en cohabitation avec un grand nombre de poissons et tortues. Leur ancien bassin a été vidangé en décembre 2019, il accueille désormais des caïmans et autres animaux aquatiques de plus petite taille.

Aujourd'hui le groupe compte les représentants suivants :

Chez les mâles :

  • MISSOURI né le 16/09/1995 au Zoo d'Arnhem ;
  • ORLANDO né le 03/02/1996 au Zoo de Nuremberg ;
  • HUMBOLDT, né au Zoo de Nuremberg et arrivé du Tiergarten de Berlin en 2019 ;
  • HERBERT, né au Zoo de Nuremberg en 2009 et arrivé du Zoo de Vincennes (Paris) en mars 2020 ;
  • QUITO, né à Beauval en 2003 ;
  • SEKOE, né à Beauval dans la nuit du 07 au 08/01/2020 ;
  • CUANGO, né à Beauval le 27/07/2021.

Chez les femelles :

  • LOLITA ;
  • FEMORE, arrivée à Beauval le 12/04/2011 ;
  • LAVIA, arrivée du Zoo de Wroclaw (Pologne) en juill. 2020 ;
  • PIRAYA, arrivée du Zoo de Wroclaw (Pologne) en juill. 2020 ;
  • ACEITUNA, arrivée du Zoo de Faunia (Espagne) en juill. 2020 ;
  • UNAÏ, née à Beauval le 23/01/2022.

Autres animaux autrefois présents dans l'installation :

  • COLUMBUS, né au Zoo de Nuremberg et arrivé du Tiergarten de Berlin en 2019, mort en 2020.

Reproduction : oui, à plusieurs reprises :

  • 1 mâle (SYLVESTRE) né le 31/12/2001, transféré au Zoo d'Arnhem (Pays-Bas) en 2005 ;
  • 1 en 2002 ;
  • 2 jumeaux (QUITO et LUNA), frère et soeur, nés en 2003 ; la naissance de jumeaux est exceptionnelle chez cette espèce. Luna a été transférée au Zoo de Nuremberg (Allemagne) en juin 2012 mais elle y est décédée en octobre 2013 ;
  • 1 né en 2008 mais disparu en bas âge ;
  • 1 mâle en 2011 ;
  • 1 mâle (MANDILO) né le 24/04/2014, fils de FEMORE, élevé au biberon dans les premiers jours de sa vie, mais allaité par sa mère peu après (!), transféré au Zoo de Nuremberg (Allemagne) durant la saison 2017-2018 ;
  • 1 mâle (CANOUAN) né le 04/03/2017, second fils de FEMORE, transféré depuis ;
  • 2 femelles (soeurs jumelles, encore une fois!) le 28/10/2017 mais seule l'une des deux survit, elle est nommée KALI'NA, du nom d'une tribu amérindienne de Guyane ; KALI'NA a été transférée au Zoo de Vincennes le 29/11/2019, elle y est morte dans l'hiver 2020-2021 ;
  • 1 mâle (SEKOE) dans la nuit du 07 au 08/01/2020, troisième fils de FEMORE ; c'est aussi la première naissance animale dans le tout nouveau Dôme équatorial !!!
  • 1 autre petit né en mai 2020 mais décédé peu de temps après ;
  • 1 mâle (CUANGO, nom d'une ville du Panama), né le 27/07/2021 ;
  • 1 femelle (UNAÏ), née le 23/01/2022, fille d'ACEITUNA et QUITO (elle pesait 29 kg le 29/01/2022, quelques jours après sa naissance).

Le savez-vous ?

  • le Lamantin n'a pas de membres inférieurs.
  • il possède une épaisse couche de graisse sous sa peau.
  • la cicatrice ombilicale est visible sous l'abdomen de cet animal.
  • mâle et femelle se ressemblent, mais quelques critères anatomiques (outre la taille) permettent de distinguer : le mâle présente une zone auto-agrippante sur les nageoires (qui lui sert pour l'accouplement !) ; les organes génitaux du mâle sont cachés dans un "sinus pénien" qui ressemble lui-même à la vulve de la femelle ! (un moyen plus sûr pour la distinction est la localisation des organes génitaux : sous le nombril pour les mâles, au niveau de l'anus pour les femelles) Le mâle et la femelle ont des mamelles, situées... sous les nageoires !
  • les poils, replis et fentes situés autour de sa bouche et de son menton lui servent d'organe tactile.
  • sa nourriture étant très abrasive, les molaires du Lamantin se remplacent tout au long de sa vie !
  • chez l'adulte, les seules dents sont les molaires et prémolaires ; les jeunes ont des incisives mais les perdent rapidement ;
  • c'est le mammifère marin officiel de la Floride.
  • étonnamment, ses plus proches cousins sont l'Eléphant et le Daman (un petit mammifère africain à l'aspect de marmotte).
  • deux espèces apparentées vivent dans le bassin de l'Amazone (Trichechus inunguis) et en Afrique de l'Ouest (T. senegalensis).
  • le Lamantin des Caraïbes est le plus grand représentant de l'ordre des Siréniens vivant de nos jours ;
  • l'aspect inhabituel et la rareté du Lamantin en Floride ont suscité des mesures de protection très précoces, dès le 18ème siècle (époque coloniale anglaise, avant l'indépendance des Etats-Unis d'Amérique !), ce qui est exceptionnel dans l'histoire de la protection de la nature et des mammifères marins (pour comparaison, la protection des Baleines dans la plupart des pays n'a été reconnue que dans les années 1980 !).

1 (2207)MANDILO et sa mère FEMORE (photo prise le 21/02/15).

Publicité
Publicité
Commentaires
D
Très intéressant, j'ai eu la chance de voir un lamantin en plongée sous marine sur une île au large du Honduras. Animal qui n'avait jamais été observé si loin de la côte auparavant. Si vous êtes intéressé j'ai une vidéo sur mon site dianesvoyages.com.
Répondre
Zootographe - Blog non-officiel du Zooparc de Beauval
Zootographe - Blog non-officiel du Zooparc de Beauval

Bienvenue dans Zootographe, un blog photo dédié au Zooparc de Beauval, un parc animalier dans lequel je me rends régulièrement. Ceci N'EST PAS un blog officiel de ce parc.

Publicité
Newsletter
Publicité